Recherchons des pistes de résiliences

Les récoltes très hétérogènes, mauvaises dans certains secteurs de l’Aube, laissent un goût amer à la profession. Une fois de plus déplore Joël Hospital, président de la FDSEA : « il faut quand même savoir que pour certains, c’est la quatrième voire la cinquième année consécutive.». Un constat qui ne fait que renforcer les pistes sur lesquelles le syndicat majoritaire se penche également depuis de nombreux mois. Son objectif : apporter des solutions plus concrètes.

L’agriculture multi-carte

« L’agriculture est le plus beau des métiers. Il existera toujours mais il faut accepter, pour ceux pour qui c’est nécessaire, qu’il prenne une forme différente. Diffé­rent ne veut pas dire incompatible. Par exemple, aujourd’hui, ce n’est pas être en échec que d’avoir une double activité : pour certains, cela permet d’avoir un revenu assuré, pour d’autres, c’est un réel choix et pour de multiples raisons. Pour pouvoir continuer à vivre de son métier, chaque agriculteur a des pistes de solutions : travailler avec d’autres, mutualiser les coûts, exercer plusieurs activités, diversifier ses pro­ductions. Rien n’est impossible. Mais il est difficile parfois de faire ce genre de choix quand on a peu de visibilité sur l’avenir. Je comprends ces difficultés. Je pense à nos jeunes aussi qui s’installent dans des conditions difficiles. Je veux leur dire que demain, ils pourront être agriculteur, surement différemment de leurs parents ou grands-parents. Ils ont cette capacité de penser le métier autrement. L’agrotourisme, le travail avec la restauration collective, la vente sur place, les peuple­raies, sont autant de pistes que nous devons développer dans nos secteurs ».

Photovoltaïque : sur bâtiment mais pas seulement

« Nous devons accompagner les agriculteurs qui le sou­haitent à regagner de la valeur. Cela passe par le aussi par le développement des nouvelles énergies, comme la métha­nisation, le photovoltaïque et d’autres projets. Avec Optim’projets, nouveau service compris à l’adhésion syndicale, une trentaine d’exploitants s’apprêtent à construire des bâti­ments agricoles avec panneaux photovoltaïques sur le toit, non seulement pour produire leur électricité mais aussi pour créer des espaces de stockages supplémentaires sur leur ferme. Une deuxième vague de projets va se mettre place l’an prochain. On ne va pas s’arrêter là. La question du photovoltaïque au sol doit être posée. Nous avons des secteurs dans le département où les productions classiques ne permettent plus de vivre. C’est peut-être une opportunité pour casser certaines barrières. Néanmoins, je suis convaincu qu’il faut définir un cadre ».

Reconversion : aider à passer le cap

« Les situations difficiles se sont multi­pliées depuis le début de l’année et ce n’est pas fini. Nous devons aider ceux qui ne pourront pas passer le cap, anticiper les départs en retraite avec des dis­positifs de pré-retraite, mais aussi aider à la reconversion professionnelle. C’est une mis­sion qui doit être commune à toutes les or­ganisations agricoles avec l’Etat. La cellule Ré­agir permet déjà cet accompagnement mais je pense que l’Etat doit prendre également sa part dans cette situation ».

Adapter la gestion de l’eau face à la sécheresse

 « Dans le plan de relance – 1,2 mil­liard d’euros sur les 100 milliards annoncés – se trouve une ligne de crédit dédiée à l’adap­tation face aux changements climatiques. L’année nous a montré, une fois de plus, à quel point dans le département de l’Aube, la sécheresse était de plus en plus problématique. Je souhaite que nous profitions de cette ligne pour développer une gestion de l’eau adaptée dans le dépar­tement, pour permettre à certains de capter l’eau de l’hiver, de la stocker et de la remettre dans les sols le moment venu. Ce projet, certes pas facile, nous allons le mener dans les mois qui arrivent ».

Le travail syndical autrement

 « A cause de la Covid 19, ces derniers mois ont été un peu particuliers pour tous les agriculteurs. Notre objectif a notamment été d’accompagner nos adhérents et de les informer en permanence sur leurs obligations ; et notamment leurs obligations d’employeurs. Dernièrement, nos actions se sont surtout jouées dans les rencontres, dans les discussions, dans les argumentaires étayés avec tous nos interlocuteurs habituels : Préfet, parlementaires, présidents d’organisations professionnelles… Le dernier exemple en date est la dérogation totale des semis de cultures intermédiaires nitrates, que l’on devrait obtenir de la préfecture. Le rôle de la FDSEA reste syndical et revendicatif mais le monde a changé, nous devons nous adapter. Nous devons également nous préoccuper avant tout de ce qui dépend de nous sans perdre de temps à parler en permanence des constats… S’il ne pleut pas, ce n’est quand même pas de notre fait !! Par contre, travailler à anticiper les risques climatiques, c’est là qu’est notre rôle. D’autres projets se préparent actuellement à la FDSEA. Par exemple, notre Carte Moisson proposera prochainement des offres d’achats groupés permettant de faire de réduire les coûts de certains achats importants pour les exploitants. Autre exemple, un groupement foncier agricole mutuel est en cours de constitution pour permettre d’aider des agriculteurs confrontés à des ventes de fonciers par leurs propriétaires. La manière de faire du syndicalisme change sur le même rythme que les évolutions des profils des chefs d’exploitation. Nous devons accompagner ces paysans déve­loppeurs tout en renforçant nos actions au service du collectif et donc directement au service de l’agriculteur et de l’agricultrice ».

© PROPOS RECUEILLIS PAR EMELINE DURAND