Paille : « attention à ne pas déstructurer tout un marché »

Eric Launoy, vice-président de l’association Les Professionnels de la Paille, appelle les entrepreneurs à ne pas pratiquer de surenchères des prix qui mettraient selon lui, une filière, organisée pour accueillir de potentiels nouveaux marchés, en péril.

L’association Les Professionnels de la Paille est une particularité dans le monde de la paille. Expliquez-nous pourquoi.

L’association a été créée par la Marne après la canicule de 2003 pour répondre à de fortes demandes de paille. Elle est unique en France. Elle organise la filière et mobilise les faiseurs de paille quand il faut réagir rapidement pour monter des opérations paille en cas de sécheresse.  Elle regroupe aujourd’hui 60 entreprises spécialisées dans la récolte et la commercialisation de la paille, marnaises et auboises. Nous sommes 25 entrepreneurs environ dans l’Aube. Pour la partie commercialisation, nous avons créé la SAS Propaille qui achète et revend la paille. Elle nous permet de contractualiser avec des entreprises ou des FDSEA ou encore des industriels qui ont besoin de gros volumes. Nous travaillons notamment avec l’agglomération troyenne pour alimenter sa chaufferie bois-paille.

Comment se porte le marché de la paille ?

Il est très fluctuant selon les années. Le prix moyen peut varier de 45 à 90 euros la tonne de paille. L’association a étudié, en lien avec les négociants, chambres d’Agriculture, coopératives, les coûts pour établir un prix de revient. Chaque entrepreneur est bien sûr libre de fixer ses prix mais il faut rester raisonnable.  Fixer ses propres tarifs sans se soucier du marché peut créer de graves répercussions pour toute la filière. On a aujourd’hui une filière apaisée avec des tarifs harmonisés qui collent à la réalité. Il ne faut pas oublier les éleveurs aubois et marnais, qui paient déjà la paille cher. Il faut penser au collectif, au monde agricole local en général. Je ne cautionne pas les professionnels qui font n’importe quoi et augmentent leurs tarifs d’achat au risque de déstructurer tout un marché.

D’après vous, la filière peut-elle être amenée à se développer ?

On en a toutes les capacités. La structure n’existe pas ailleurs en France et de nombreuses entreprises réfléchissent actuellement à trouver de nouvelles utilisations pour la paille, comme biocarburant par exemple mais aussi dans les isolants. La SAS fournit déjà des sociétés qui ont de la recherche et du développement sur le sujet.  Ce qui me fait dire que l’on pourrait se développer et augmenter la production de paille ici, dans les prochaines années. Aujourd’hui on produit en moyenne 300 000 tonnes de paille par an dans l’Aube et la Marne. On pourrait facilement doubler les productions. On a prouvé qu’on était capable de le faire et en peu de temps, pour de grosses opérations paille.

© Propos recueillis par Emeline Durand