La moisson s’annonce compliquée

A cause des larves de grosse altise et des gelées de printemps, les rendements en colzas s’annoncent faibles : entre 5 à 35 quintaux dans le Barrois, selon Gaspard de Courson, conseiller GDA Sud Aube.

Des surfaces hétérogènes en colza, un potentiel très entamé sur les orges d’hiver comme les protéagineux, seul le blé devrait, selon les conseillers GDA de la Chambre d’agriculture de l’Aube, tirer son épingle du jeu dans une récolte marquée par de forts à-coups climatiques.

Le début de la moisson est imminent : conséquence d’un hiver doux et d’un printemps chaud et ensoleillé, les premières récoltes s’apprêtent à démarrer en particulier dans le sud du département. Avec une bonne dizaine de jours d’avance sur le calendrier habituel. Loin d’être la seule particularité cette année, la météo, tout aussi inhabituelle, a largement influencé les rendements, dont les premières estimations sont plutôt très pessimistes dans l’Aube. « C’est assez compliqué dans nos secteurs, observe Gaspard de Courson, conseiller GDA Sud Aube, notamment pour les colzas ».

Colza : très hétérogène

A cause des larves de grosse altise et des gelées de printemps, 30 à 40% minimum ont été retournés. « Et sur ce qu’il reste, il y a beaucoup d’hétérogénéité ; ce sera très faible en rendement, entre 5 et 35/40 quintaux pour les meilleurs », estime le conseiller. Le seul espoir viendra peut-être du remplissage du grain et du PMG : « on a des conditions de maturité plus optimales avec une baisse des températures ces derniers jours et donc moins de stress ».
Même analyse dans le nord du département : « les colzas ont été en difficulté dès le départ en septembre », souligne Franck Gallet, conseiller GDA responsable du secteur nord : un temps plus sec, des levées plus compliquées et une pression parasitaire importante, si le retournement a été moindre comparé au Barrois, « les beaux colzas sont rares dans la plaine », souligne le technicien. Les rendements s’annoncent également très hétérogènes, de l’ordre de 15 à 40 quintaux. Les prévisions ne sont guère plus rassurantes pour les céréales : « les six semaines sans eau dans nos terres superficielles ont fait des dégâts », constate Gaspard de Courson.

Orges d’hiver et blé : décevant

Un potentiel très entamé sur les orges d’hiver, décevant pour le blé, même si les dégâts ont été limités « sur les terres intermédiaires », remarque le conseiller qui tempère ses propos. Les fins de cycle se sont mieux passées pour le blé grâce à une pression maladie faible et bien gérée : c’est ce qu’il y a de plus prometteur. Le hic, c’est que le marché ne suit pas.
Côté nord, on table sur un rendement de 80 à 90 quintaux pour les meilleures parcelles, notamment grâce à une sécheresse moins impactante en mars et avril que dans le sud du département. « Il ne faut pas perdre de vue que l’automne a été pluvieux et que les agriculteurs ont eu peu de créneaux pour semer dans de bonnes conditions », rappelle Franck Gallet. Le tout malgré le peu de pression maladive et un bon développement grâce à la douceur hivernale, jaunisse sévère et pucerons présents dès le début du cycle.

Orge de printemps : la jaunisse se généralise

Côté orge de printemps, le département table sur une baisse de l’ordre de 10 à 20% même s’il est encore un peu tôt pour estimer le potentiel. « La jaunisse depuis un mois se généralise mais on compte sur le remplissage pour faire la différence », précise le conseiller GDA. Les protéagineux s’annoncent également mal engagés tout comme les fourrages : les premières coupes assez décevantes dans l’Aube  n’ont pas permis de faire des foins en grosse quantité. La sécheresse est en cause et plus globalement, les variations brutales des conditions climatiques et des solutions limitées. « Le parasitisme, ajoute Franck Gallet, notamment les pucerons présents sur toutes les cultures après deux hivers sans froid devient compliqué à gérer. »

© Emeline Durand

 

Décrochage plus marqué en Champagne

Le service statistique du ministère de l’Agriculture (Agreste) a livré ses premières estimations de récolte, montrant des orges d’hiver en fort décrochage, un colza stable. En 2020, la production s’achemine vers « une nette baisse en orges d’hiver (-11,7 % sur un an) et une stagnation du colza à un niveau bas (3,46 Mt) ». L’orge d’hiver a connu des « difficultés d’implantation à l’automne, qui ont pesé sur les surfaces » (-1 %), puis une « sécheresse printanière, en particulier dans le Nord Est ». Sa production est annoncée à 8,17 Mt, avec « un recul significatif du rendement qui s’établirait à 63,2 q/ha » (70,9 q/ha en 2019). Décrochage qui apparaît limité dans le Centre, principale région productrice, à -4,7 q/ha, plus fort en Champagne-Ardenne (-13,7 q/ha) ou en Pays de la Loire (-11,5 q/ha). La récolte de colza est prévue à 3,46 Mt, un chiffre quasi-identique à l’an dernier (+0,1 %) mais loin de la moyenne quinquennale (-7,3 %). Côté rendement, 31,8 q/ha sont annoncés soit +1,5 % sur un an mais -4,3 % par rapport à 2015-19. Les surfaces régressent (-1,4 % sur un an), avec des disparités : plusieurs régions marquent une nette hausse, comme Midi-Pyrénées (+30,5 %), l’Ile-de-France (+20 %), Poitou-Charentes (+15,6 %), mais « sans compenser les baisses importantes des années précédentes », d’autres dégringolent, notamment l’Auvergne (-42 %), la Bourgogne (-22,6 %).