La prestation de service internationale

Selon un bilan de la DIRECCTE Grand Est de 2017, la région serait la première à être concernée par le détachement des salariés. Les exploitants ou viticulteurs sont généralement démarchés par des entreprises prestataires de services de main-d’œuvre étrangère. Il convient d’être très vigilant par rapport à ce type d’entreprise.

© JC. Gutner

La prestation de service internationale (PSI) est un contrat qui engage une entreprise française (le « donneur d’ordre ») et une entreprise prestataire établie hors de France. L’entreprise prestataire détache temporairement ses salariés en France pour y accomplir une prestation. Prenez vos précautions, il existe un cadre règlementaire ! Pour être valable, le contrat de prestation doit être conclu sous forme écrite et être rédigé en bonne et due forme. Le prestataire de service est un professionnel indépendant qui conserve l’autorité directe sur les salariés détachés et les encadre de manière autonome, sans l’intervention de l’exploitant agricole (le « donneur d’ordre »). Le prestataire de service se doit de respecter une obligation de résultats en matière d’apport technique (matériel, savoir-faire particulier) ainsi que d’apport en main-d’œuvre. L’entreprise prestataire doit réaliser une tâche spécifique sur l’exploitation agricole (et non se limiter à l’apport exclusif de main-d’œuvre).

L’entreprise prestataire et le donneur d‘ordre sont parties au contrat. Les conditions de la prestation, les tâches à réaliser et la main-d’œuvre apportée devront être mentionnés dans le contrat. La facturation sera calculée par un coût forfaitaire déterminé selon l’importance des travaux (et non selon les heures de travail réalisées). L’exploitant agricole (le “donneur d’ordre“) qui fait appel à un prestataire de service engage tout de même sa responsabilité. En effet, ce n’est pas parce qu’il délègue qu’il n’est pas tenu pour responsable en cas d‘incident. Pour tout contrat d’un montant au moins égal à 5 000 € HT, le donneur d’ordre a à avoir des points de vigilance.

La procédure

Les pièces figurant dans le tableau ci-dessus peuvent être communiquées à tout organisme (Direccte , police judiciaire, police des frontières, MSA, Urssaf, Dreal, Pôle emploi, etc.) les demandant, sous format papier ou électronique. Le donneur d’ordre doit s’assurer de l’authenticité des pièces communiquées par l’entreprise prestataire. L’entreprise prestataire de service domiciliée à l’étranger doit appliquer aux salariés détachés en France, pendant toute la durée de la prestation, les règles du droit du travail français (y compris les conventions collectives).

La déclaration préalable de détachement est une démarche obligatoire qui se fait de manière dématérialisée (https://www.sipsi.travail.gouv.fr/auth/login). Depuis juillet 2019, la procédure dématérialisée a été simplifiée pour les entreprises étrangères. La transmission des déclarations est faite de manière sécurisée via la téléprocédure SIPSI. Aucun délai minimal n’est prévu pour la transmission de la déclaration avant le début du détachement. Cependant, nous vous conseillons de respecter un délai de 3 semaines avant la date de détachement prévu.

La déclaration préalable de détachement ou l’attestation de détachement doivent être faites par l’entreprise prestataire employeuse. Cette saisie doit être faite pour chaque prestation. Seules les déclarations complètes peuvent être enregistrées. L’exploitant agricole ou le viticulteur a accès au service de téléprocédure SIPSI pour vérifier que l’entreprise prestataire s’est correctement acquittée de ses obligations. Si l’exploitant agricole ou le viticulteur ne s’est pas fait remettre d’une part, une copie de la déclaration enregistrée sur SIPSI et d’autre part, la désignation d’un représentant présent sur le territoire français alors il devra adresser au maximum 48 heures suivant le début du détachement, une déclaration « subsidiaire » à la Direccte du lieu où la prestation est réalisée. Cette démarche devra être faite via SIPSI et justifiée par tout moyen lui donnant date certaine, qu’elle a été faite dans le délai prévu. La déclaration a-t-elle été correctement transmise ? Vous avez un doute ? Rendez-vous sur SIPSI, dans l’onglet “Déclarations transmises”.

L’entreprise donneuse d’ordre doit être en mesure d’indiquer le nombre de salariés détachés accueillis. Chaque déclaration de détachement doit être annexée au registre unique du personnel. A défaut, la déclaration « subsidiaire » du donneur d’ordre faite dans les 48h pourra y être annexée.

Quelles sanctions

Pour l’entreprise prestataire

Liste des manquements graves : repos quotidien, repos hebdomadaire, durée quotidienne maximale, durée hebdomadaire maximale, hébergement indigne, non-paiement du salaire, représentant en France, paiement des amendes administratives antérieures. Si manquement, la Direccte contacte l’entreprise prestataire et en informe le donneur d’ordre.

  • A défaut de régularisation du manquement dans les 3 jours : la Direccte peut, sur décision motivée, suspendre la prestation de service par l’employeur prestataire. Cette suspension ne peut pas excéder 1 mois. La suspension cesse lorsque le manquement constaté n’est plus présent.
  • Si la Direccte ne reçoit pas la déclaration de détachement (passé les 48h du début du détachement) : la Direccte peut, sur décision motivée, suspendre la prestation de service. Cette suspension ne peut pas excéder 1 mois. La suspension cesse lorsque la déclaration de détachement a été transmise à la Direccte (le donneur d’ordre peut la lui transmettre).
  • En cas de défaut de paiement des amendes :
  • Avant le début de la prestation, l’entreprise prestataire en est informée par la Direccte qui demande de les payer
  • A défaut de régularisation avant le début de la prestation : sur décision motivée => interdiction de la PSI pour 2 mois renouvelable. L’interdiction cesse lorsque les paiements sont intervenus.

Les suspensions de PSI n’entraînent aucune interruption ou fin du contrat de travail.

Pour le donneur d’ordre

Une disposition du Code du travail liste les documents à tenir à disposition de l’Inspection du travail, en langue française et sans délai. Le donneur d’ordre peut être pénalisé et recevoir des amendes administratives pour : l’absence de déclaration de détachement, l’absence de désignation de représentant en France, et l’absence de déclaration d’accident transmise à l’Inspection du travail

Le défaut de déclaration préalable de détachement ou d’attestation de détachement est sanctionné par une amende administrative (dont le montant varie selon la faute).

A défaut de régularisation après un contrôle, la responsabilité de l’entreprise prestataire et du donneur d’ordre sera engagée. Il y a responsabilité solidaire pour toutes questions relatives au droit du travail, paiement de salaires, hébergement et représentant absent sur le territoire français. L’entreprise agricole ou viticole (« donneuse d’ordre ») bénéficiaire de la prestation de services qui n’a pas les pièces requises est aussi reconnue solidairement responsable de l’entreprise prestataire de service en situation frauduleuse. Le donneur d’ordre sera pénalisé au même titre que l’entreprise prestataire en cas de condamnation vis-à-vis des salariés, de l’URSSAF, de la MSA ou de l’administration fiscale. Si l’opération réalisée n’est pas réellement une prestation de service (exemple : il s’agit de fournir uniquement de la main-d’œuvre pour l’accomplissement des travaux), l’entreprise agricole ou viticole peut être considérée comme étant le véritable employeur des salariés et dès lors, répondre aux éventuelles infractions constatées (exemple : le travail dissimulé).

© Claire RINGEISEN