Une filière à chouchouter

Face aux rendements en baisse et aux aléas climatiques, la filière chou veut se structurer pour avancer. A la Choucrouterie Laurent, ce développement passe par l’innovation, avec la création d’une nouvelle gamme, en lien avec les producteurs de chou locaux.

La récolte et la production de choucroute, semi industrielle, mobilisent jusqu’à 70 personnes de septembre à décembre. © CHOUCROUTERIE LAURENT

La Choucrouterie Laurent  est pour ainsi dire, restée dans son jus : à Blignicourt, cernée par les champs, les bâtiments sont installés en lieu et place depuis près de 75 ans. L’irréductible entreprise familiale résiste à une conjoncture peu favorable à la culture du chou pommé. Ces dernières décennies ont vu s’égrainer un à un les choucrouteries du secteur. De 15, elles ne sont plus aujourd’hui que deux dans la plaine de Brienne.  « C’était une activité florissante à l’époque », admet François Laurent. Le dirigeant de l’entreprise 100% familiale forme avec ses deux sœurs et son beau-frère, la quatrième génération d’une structure créé en 1906 et devenue grâce à une stratégie familiale avant-gardiste, leader sur le marché français.

25 % de la production française

Si le modèle tient, c’est sans doute grâce à ce côté précurseur, qui a toujours tiré l’entreprise vers le haut. Alors que l’arrière-grand-père Paul, se lance en 1906 dans la production de choux, c’est André, le grand-père qui décide  de construire une choucrouterie en 1945. Précurseur lui aussi, Michel, le père, initialement boucher-charcutier, jette son dévolu au milieu des années quatre-vingts dans la production de choucroute cuite, sentant le marché évoluer. Résultat : de 45 tonnes de choucroute produites en 1945, l’entreprise de 35 salariés est passée à 8 000 tonnes, soit presque 25 % du marché national, pour un chiffre d’affaires de 6,3 millions d’euros.
La quatrième génération Laurent s’apprête à relever un autre défi : celui de la diversification, avec une nouvelle gamme qui sortira dès 2020. « Nous sommes reconnus pour la qualité organoleptique de notre choucroute, la seule à avoir le Label Rouge, explique François Laurent. On redécouvre les vertus de la choucroute depuis cinq ans. Peu énergivore à produire, riche en fibre, peu calorique et remplies d’antioxydants ».

Une gamme d’alicaments

C’est sur ce terrain santé que l’entreprise s’est penchée, en créant une gamme proche d’un alicament de salades-condiments bio prêtes à consommer, à base de légumes facto-fermentés. Vegan & Bio, c’est son nom, prendra place dans les rayons des magasins bio d’ici l’été prochain.
La plupart des légumes seront cultivés sur place. De bon augure pour la dizaine de producteurs sous contrat avec l’entreprise estime François Laurent. L’autre challenge du numéro un français de la choucroute, c’est celui de conforter la filière qui fait face sur les dernières récoltes, à des baisses de rendements importantes. La saison s’est achevée mi-décembre avec une production en baisse de 30%  « à cause de la chaleur mais aussi des attaques d’insectes comme l’altise », observe François Laurent. Pour continuer à être rentable, les producteurs de chou veulent créer un Groupement d’Intérêt Economique. « Ils travaillent de mieux en mieux et pourtant la production baisse. On veut comprendre pourquoi, voir si cela vient des sols et trouver des solutions, détaille François Laurent. Dans un contexte où les céréaliers cherchent à diversifier leurs cultures,  « pour motiver les producteurs à poursuivre la production de chou pommé, il faut que la culture soit rémunératrice ».

© Emeline Durand