Piétin-verse : relativiser les risques agronomiques et climatiques

La grille de risque permet de déterminer le risque sur chacune des parcelles.

Le climat doux et humide depuis le début de l’automne peut faire craindre un risque climatique important concernant le piétin verse. Ce risque est néanmoins à relativiser selon le contexte agronomique de la parcelle (variétés, dates de semis, travail du sol, cultures précédentes) et l’inoculum présent en plus ou moins grande quantité sur les pailles des précédents. Voici quelques éléments pour une prise de décision rationnelle.

Une grille de risque pour orienter les observations au champ

La grille de risque ci-dessous permet de déterminer le risque sur chacune des parcelles. Elle prend en compte la sensibilité variétale (voir le paragraphe ci-dessous), le potentiel infectieux (fréquence de retour du blé dans la rotation, travail du sol, le labour favorisant les remontées de résidus de culture en surface), le type de sol et le risque climatique. Le score final positionne ensuite la parcelle en risque faible (aucune intervention), en risque moyen ou en risque fort. Dans ces deux derniers cas, l’observation est obligatoire avant toute intervention !

Astuce : servez-vous de l’estimation du risque parcellaire pour observer prioritairement les parcelles les plus à risque. S’il n’y a pas de piétin verse sur celles-ci, il est peu probable  que les parcelles moins à risque soient touchées. En effet, il y a une bonne corrélation entre les différents niveaux de risque et la pression observée dans les parcelles.

Caractérisation du risque climatique de l’année

Le modèle TOP calcule un indice de risque climatique au niveau régional sur blé tendre d’hiver en sortie d’hiver. Les données d’entrée sont la pluie et les températures journalières à partir de la date de semis : en effet, une pluviométrie élevée et des températures douces durant l’automne hiver sont favorables au développement du piétin verse, à condition que l’inoculum soit présent. Les semis précoces sont davantage associés à un risque climatique élevé que les semis tardifs car soumis à des contaminations précoces (si inoculum présent), qui laissent plus de temps au champignon pour progresser à travers les différentes gaines en direction du cœur des tiges.

A noter : le risque climatique prend uniquement en compte les paramètres climatiques, la sensibilité variétale est exclue (mais prise en compte dans la grille globale).

Relativiser le risque de l’année : inoculum de moins en moins fréquent

Le piétin-verse est une maladie inféodée à la parcelle qui touche uniquement les bas de tiges. L’inoculum se maintient d’une année à l’autre sur les chaumes, les repousses de céréales, ou les graminées adventices contaminées. Il faut donc qu’il y ait eu une attaque conséquente les dernières années pour qu’un minimum d’inoculum soit présent dans la parcelle et contamine ensuite les tiges durant l’hiver et le printemps. Or, depuis 10 ans dans la région, peu de symptômes ont été observés, même les années où les risques étaient a priori forts (climat favorable, risque agronomique élevé…). L’inoculum est donc « naturellement » plutôt faible, et doit conduire à relativiser les risques agronomiques et climatiques parfois élevés annoncés par les outils. Le risque a priori calculé via la grille et le modèle mérite donc d’être confirmé par l’observation des parcelles.

La meilleure parade : la résistance variétale

La résistance variétale est le moyen de lutte le plus efficace : si la note CTPS est supérieure ou égale à 5, aucun traitement anti-piétin n’est nécessaire. Dans notre région, 20% des parcelles sont implantées avec des variétés notées 5 ou plus au piétin-verse et ne nécessitent aucune intervention. L’observation est donc indispensable sur toutes les autres variétés en situation à risque, afin de ne pas déclencher un traitement inutile et coûteux.

Intervention phytosanitaire : un retour sur investissement uniquement quand la pression est très élevée

La nuisibilité moyenne du piétin verse ces dernières années est de l’ordre de 3-4 q/ha. Associée à une érosion progressive des efficacités des différentes spécialités du marché (30 à 45% d’efficacité maximum) et une généralisation de populations résistantes aux benzimidazoles et prochloraze, il est important de raisonner les interventions phytosanitaires afin de ne pas déclencher d’intervention peu rentable. Ainsi, en partant des hypothèses suivantes : investissement anti piétin 30 €/ha, avec une efficacité de 30% (efficacité moyenne dans les essais), prix du blé à 15 €/q, un traitement est rentable si la nuisibilité liée au piétin verse est d’au moins 10 q/ha. D’où l’intérêt d’utiliser la grille de risque pour définir les parcelles les plus à risque, et de faire une observation précise avant toute intervention.

Alexis DECARRIER, Mélanie FRANCHE et Philippe HAUPRICH, ARVALIS-Institut du végétal

 

Quelques rappels pratiques pour des observations réussies

Méthode de prélèvement : prélèvement au champ 20 tiges issues de 10 points de prélèvements en parcourant en diagonal la parcelle. Si besoin, laver la base des tiges. Observer les symptômes et compter le pourcentage tiges atteintes par le piétin verse. Il vous suffit ensuite d’appliquer le seuil ci-dessous pour déclencher ou non une intervention.

Les seuils d’intervention sont les suivants (au stade 1 Nœud) :

  •  <10% de tiges atteintes la nuisibilité est nulle.
  • Entre 10 et 35% de tiges atteintes la nuisibilité est variable.
  • Au-delà de 35% de tiges atteintes la nuisibilité est certaine.

Les essais montrent que « 10% de tiges touchées à 1 nœud » peut engendrer un impact d’1 q/ha.

Des éléments clé pour la reconnaissance du piétin verse au champ :